Des Funérailles de Porcelaine, notes de lecture

Nous avons déjà cité, ici, à l’occasion de notre 1ère participation au « Printemps des Cimetières » à Vayres, en 2022, l’ouvrage de Jacqueline Lapouge auteure originaire de Cussac, « Hier, au Pays des Feuillardiers… Granit et porcelaines… Dernier volet de la série « Hier, au pays des Feuillardiers ».

Dans son ouvrage, il est question des cimetières locaux, lieux d’art au patrimoine funéraire d’exception, où tailleurs de pierre, ferronniers, porcelainiers, maîtres de forges… Ont laissé de nombreux témoignages de leur savoir-faire…

Nous avions accueilli cet auteure, véritable passeuses d’histoire locale, lors des Journées Européennes du Patrimoine, consacrée au Matrimoine au Lavoir de Vayres Les Roses le 17 septembre 2022. Voici l’article: 1ère journée du Matrimoine à Vayres


Pour cet article, nous allons partir des notes de lecture de Des Funérailles de Porcelaine de Jean-Marc Ferrer et Philippe Grandcoing , nourrir et préciser ces notes puis poursuivre la réflexion.

la sociologie de la mort, c’est l’autopsie du vivant

-Pedro Meca

Des Funérailles de Porcelaine

Pour cette nouvelle édition du Printemps des Cimetières, nous avons lu et feuilleté de nombreux ouvrages, un est à retenir. Il s’agit de « Des Funérailles de Porcelaine » de Jean-Marc Ferrer et Philippe Grandcoing .

L’art funéraires des plaques en porcelaine est un art profondément original, il atteste de l’attachement très importants de la région de Limoges à la porcelaine.

Il est aussi l’antithèse des fabricants célèbres de la porcelaine de Limoges, car cet art funéraire se pratiquait dans des ateliers de décoration aux dimensions modestes. Cet art peut se lire comme une tentative de résistance à la banalisation d’un art devenu industriel.

Livre Édition Culture Et Patrimoine En Limousin, 2000. 

Une des pages du livre Des Funérailles de Porcelaine, Plaque funéraire, Limoges, 1864

Des Funérailles de Porcelaine, est un livre, mine d’or, empli d’anecdotes, d’explications, de contextualisations et de photographies superbes nécessaires à la compréhension du patrimoine funéraire local.

Cette tâche de valorisation du patrimoine funéraire présent en Haute-Vienne, apparait fondamentale tant ce patrimoine est fragile.

Ce Petit chef d’œuvre de lecture historique, fort bien écrit et richement illustré, a été emprunté à la médiathèque d’Oradour-Sur-Vayres en ce qui nous concerne.

C’est une lecture que nous vous recommandons, à découvrir tel un « conservatoire » à page ouverte, à lire comme un précis d’histoire sociale, religieuse et de politique locale.

Les cimetières de Limoges, Saint-Junien et Bellac sont très souvent cités, toutefois, au regard de cette exploration historique locale, il nous a semblé important de considérer l’aire directe d’influence de la ville de Limoges, à savoir 60 km autour d’elle:

Vayres en fait donc partie!

L’imagerie sur les plaques funéraires en porcelaine est révélatrice du rapport à la mort et à l’au-delà, des mutations de la société limousine, de l’évolution technique et artistique de l’industrie porcelainière limougeaude.

Philippe Grandcoing est un historien à qui l’on doit de nombreux romans et une enquête passionnante, L‘Affaire Barataud (Limoges 1929, une des plus célèbres affaires criminelles de l’entre deux-guerres)sorti en 2022- Geste éditions. France 3 Régions Limoges un nouveau livre sur l’affaire Barataud

-Avant toute chose, veuillez retenir que l’existence des plaques funéraires en porcelaine (introduite dès 1820, généralisée vers 1840 au cimetière de Louyat (Limoges) voient leur existence évoquées la première en 1925 grâce à un célèbre émailleur, Léon Jouhaud.

Léon Jouhaud, dans son atelier à Limoges,

« En ce début du XXe siècle, l’étoile de l’émail de Limoges est en train de pâlir. Muni d’un livre ancien, Léon Jouhaud s’immerge dans l’univers des arts du feu. Il n’y connaît rien. Durant des mois, il triture la matière, tente de comprendre ses rébellions et ses nombreuses mutations. Chimiste éclairé, il découvre le sens des couleurs et des volumes. Il s’éteint en 1950, laissant derrière lui près de 900 pièces, mais aussi des huiles et des pastels. En 2003, Pascale Nourrisson a publié aux éditions Souny Léon Jouhaud, le magicien de l’émail. Ce très bel ouvrage met à l’honneur l’artiste et surtout donne la parole à sa fille Suzanne Salon. » Source


La question du cimetière a une portée éminemment symbolique

Dans l’ordre d’apparition du livre, Des Funérailles de Porcelaine, voici ce que nous avons retenu (nous avons ajouté des précisions historiques et préciser les évolutions des lois )

Appelé aussi Champ du repos, à la fois source de distinction et élément clé de la stratification sociale, il fait apparaître un cadre légal, fait évoluer le droit et la loi, souligne l’évolution de notre rapport sociétal et culturel à la mort, à la place du vivant, aux espaces publics et intimes…

Le poids des hiérarchies traditionnelles, l’importance des anciens métiers est palpable dans un cimetière.

L’art funéraire traduit les dualités et les tensions du monde du travail mais relate aussi l’histoire de l’industrie de la porcelaine.

La mémoire de la porcelaine est une grande source de l’histoire de l’imaginaire social.

L’art funéraire est un témoignage des vestiges d’une époque en proie à une très grande fragilité. Malgré son hétérogénéité, il est, aujourd’hui, en grand danger.

La plaque funéraire est la traduction des sentiments, des émotions, des représentations de l’au-delà.

Tout d’abord ronde, puis contrée, la plaque de porcelaine évolue; elle a pour vocation d’interpeller.

Cet ensemble céramique est unique au monde, il est un hommage aux ouvriers porcelainiers, aux artistes anonymes et aux acteurs de la porcelaine restés dans l’ombre.

Il faut savoir que la céramique se banalise vers 1860-70.

Fruit de l’aristocratie ouvrière, le message des plaques est aussi politique au sens anticlérical du terme.

Une tombe c’est une identité pour l’éternité.

Le vrai tombeau des morts n’est-ce pas le cœur des vivants?

Quelques dates et petits détours historiques

1768 – Découverte de gisements de l’or blanc du Limousin, le Kaolin, à St Yrieix-la-Perche

Au XVIII, les cimetières sont situés intra-muros et extra-muros. En 1776, l’inhumation est interdite dans toutes les églises du Royaume.

1780, fermeture du cimetière des Innocents

Le cimetière des Innocents, ou cimetière des Saints-Innocents est un ancien cimetière situé dans le quartier des Halles de Paris, à l’emplacement de l’actuelle place Joachim-du-Bellay au centre de laquelle se tient la fontaine des Innocents.

En raison de l’insalubrité des lieux et d’un usage continu pendant au moins 15 siècles, le cimetière des innocents fut fermé dans les années 1780 après que les murs de la cave de maisons voisines, rue de la Lingerie ne s’écroulent sous le poids des ossements. A l’origine élaboré en dehors de la ville, le long d’une voie romaine (qui deviendra la rue Saint Denis), le cimetière des champeaux qui deviendra le cimetière des innocents devient vite le lieu d’inhumation des faubourgs de la rive droite à l’époque gallo-romaine.

Une chapelle dédiée aux Saints Innocents existait déjà avant les invasions barbares du IXe siècle. Situé à proximité des Halles où les foires attiraient les marchés, le lieu devient vite également un repère pour les brigands. Aussi, Philippe Auguste souhaita que le cimetière des innocents fût entouré d’une enceinte et fermé la nuit.

Ce qui lui offrit une place dans la ville.

Ce lieu était devenu mythique et des croyances sur sa terre s’étaient développées au cours des siècles. Jusqu’à une trentaine de paroisses parisiennes utilisèrent en partie le cimetière des innocents.

Comme de nombreux cimetières médiévaux, qui étaient de rares espaces ouverts au centre de la ville, il était très animé le jour au même titre que les places. En raison des halles toutes proches, il était envahi de marchands. Les bancs et étalages y étaient très présents. Au XIIe siècle, au cimetière des innocents, on y avait laissé le marché aux chevaux. Le mur de Philippe Auguste de 1186 l’entourant, le protégea un peu sans remettre toutefois en cause le marché à l’herbe et au foin.

Tous les cimetières français étaient de confession religieuse (catholique, protestant, juif) avant la révolution française de 1789.

L’organisation des obsèques, la cérémonie, l’inhumation, la sépulture étaient les domaines réservés de la religion.

Les préoccupations de salubrité publique amènent en effet la dépossession progressive des cimetières par les autorités religieuses.

Dès 1804, un cadre juridique impose le caractère communal du cimetière. Ce monopole instaure alors le principe d’égalité face à la mort, laissant néanmoins aux croyants la possibilité d’une inhumation selon les rites funéraires religieux de leur choix.

12 juin 1804

Décret qui ordonne la fermeture des cimetières trop proches des habitations, ils seront éloignés de la ville.

Hygiénisme -Principe selon lequel les pratiques politiques, sociales, architecturales et urbanistiques doivent suivre les règles de préservation de l’hygiène et de la prévention en santé publique, selon les prescriptions médicales et éventuellement diététiques.

Cimetière Jardin

« Formant des paysages romantiques, les cimetières ne sont pas alors « conçus pour être sains mais pour être beau ». (M. Lassère).

Les municipalités se son attachées à ne faire des lieux agréables à l’œil, susceptibles d’intéresser les touristes.

Leurs modèles, celui des parcs et jardins élaborés par les anglais au XVIII siècle, avec essences variées, allées sinueuses, recherche du pittoresque et refus de la géométrie et de la monotonie.

1804 Père Lachaise (44 hectares) fait figure de référence. Dès son ouverture en 1804, le « cimetière de l’Est », tel qu’il se dénommait à l’origine, a été une destination de promenades des Parisiens, curieux de découvrir leur nouveau « champ de repos ». Les premiers guides qui lui sont consacrés, à partir de 1808, révèlent un véritable intérêt des Parisiens pour ce nouveau cimetière, alors hors les murs, à la fois lieu de recueillement et de balades bucoliques.

1804 – Création de l’Ecole de dessin à Limoges par la Société d’Agriculture et des Arts

1806 – Bénédiction du cimetière de Louyat à Limoges, traité à l’instar de celui du Père Lachaise – Ce cimetière est l’un des plus grands de France (34 hectares)-

Jardin paysager: plantation d’arbustes et de vivaces, rosiers, églantiers, buis, autour de la tombe se constitue un espace fleuri.

Avec l’hygiénisme, c’est l’apogée de la tombe individuelle, ce qui implique la présence d’épitaphe.

Au cimetière de Limoges devaient être plantés des buis, rosiers, arbustes, acacias, pins, tilleuls, chênes, bouleaux, cerisiers…

La végétalisation sur les stèles et dans les cimetières présentent la mort comme un long sommeil.

Référence explicite au romantisme ( mouvement culturel apparu à la fin du XVIII siècle en Allemagne et en Angleterre et se diffusant à tout l’Occident au cours du XIX siècle, jusqu’aux années 1850. )

La Serpentine est présente car sa teinte convient à la construction funéraire mais ce n’est pas une pierre mais une famille minérale faisant partie du groupe des silicates et du sous-groupe des phyllosilicates.

Cette famille se compose de plus de 20 membres dont les principaux sont l’antigorite, le chrysotile et la lizardite.

Les roches composées en grande partie de minéraux de serpentine sont appelées serpentinites. Ce nom résulte de leur couleur généralement verte et de leur aspect écailleux, voire soyeux, qui rappelle la peau des serpents).

A Vayres, la carrière de Merlis, – serpentinite : usage funéraire : construction et croix.

Architecture des tombes : les tombes dressées sont inspirées des tombeaux de l’antiquité romaine).

Tombe ancien cimetière de Vayres, mai 2023

Vers 1820, la plaque de Porcelaine fait son apparition au cimetière de Louyat (Limoges).

1840 – Diffusion de la plaque funéraire de porcelaine grâce aux ouvriers porcelainiers à l’ensemble des couches sociales.

Les plaques, leur couleur, leur éclat, beaucoup d’entre elles sont volées. Certaines sont de véritables chef-d’œuvre de porcelaine, ce qui engendre un modèle de cimetière unique en son genre . Le porcelaine est tout simplement en lieu et place de la sculpture!

Porcelaine dure : Kaolin, Feldspath, Quartz.

On peut noter au dos des stèles, des symboles de Franc-maçonnerie.

L’état manifeste d’abandon de certaines tombes au cimetière de Louyat interpelle, les murs s’écroulent, les allées sont impraticables, sont à déplorer des déjections d’animaux (cochons).

La place aux émotions et au registre affectif :

Le Saule pleureur présent sur les plaques apporte l’idée de déploration ( fait de manifester des sentiments de douleur, de compassion, de simples regrets ou lamentations)

Longtemps, le saule pleureur a été un arbre riche en symboles. Originaire de Chine, le saule pleureur fût importé en Europe vers la fin du 17ème siècle. Sa nature ornementale en fait un arbre très propice à la réflexion et on retrouve souvent le saule pleureur au bord d’un lac. Ses longues branches tombantes lui valent l’appellation de “pleureur” et on comprend bien pourquoi : l’arbre donne vraiment l’impression de déverser des larmes.

A noter, dans la tradition chinoise, le saule pleureur est un symbole d’immortalité, sans doute parce qu’un rameau de Saule planté en terre renaît à la vie Aussi, il représente la communication avec le ciel. Par ailleurs, pour les tibétains, il est l’arbre de vie.

Plaque, ancien cimetière de Vayres, mai 2023

L’importance du noir, couleur du deuil qui s’illustre par un mince filet (1860) et large bordure vers 1890.

La Porcelaine c’est la « fille du granit », porcelaine dure (Kaolin, Feldspath, Quartz).

Offrande de fleurs :

Comme dans un vaste jardin, on plante des vivaces pour leur pérennité, pour ne pas rappeler la douleur du trépas (type fleurs coupées qui vont vite dépérir)

Les plaques de porcelaine sont la représentations mentales et esthétiques de la mort.

Au début, seuls les notables peuvent se permettre d’y avoir recours.

Dans le Limousin, le culte des ancêtres est important !

La plaque en porcelaine n’est pas chère (elle correspond en franc à une journée de travail) ce qui permettra a une plus grande partie de la population n d’y avoir accès.

Mais elle est fragile, alors les plus riches vont lui préférer la pierre ou le marbre.

1850

On assiste à une montée de l’anticléricalisme, en réaction, la mort devient très chrétienne. L’on peut dire que le politique est quasiment absent des cimetières toutefois la lutte, affrontement symbolique entre catholiques et anticléricaux est très vive.

On assite à la promotion de l’individu notamment des femmes.

Les pratiques culturelles des limousins tiennent en leur attachement aux saint locaux.

1850 – Début de la Chrysanthème (Toulouse)

On voit apparaître, au Second Empire (1852/1870), un nouveau type de tombes avec l’avènement des chapelles et des caveaux.

Petit rappel second Empire –

Second Empire (empire autoritaire à empire libéral/ d’Austerlitz à Sedan).

Louis-Napoléon Bonaparte organise un coup d’État dans la nuit du 1er au 2 décembre 1851. Une nouvelle Constitution prend effet le 14 janvier 1852.

  • Louis-Napoléon Bonaparte est d’abord président de la République puis, la dignité impériale et héréditaire étant rétablie en novembre 1852, il devient l’empereur Napoléon III.
  • Le Second Empire s’achève peu après la défaite de Sedan contre la Prusse le 2 septembre 1870.

—–Dans les allées des cimetières, on isole riches et pauvre, on crée des ségrégations sociales.

Dans le livre Nos funérailles de Porcelaine, est citée la Croix Hosannière;

Croix Hosannières (présentes dans les villages).

A l’instar des calvaires, des croix de missions et des lanternes des morts, une croix est dite hosannière, car depuis le Moyen Age, on y venait en procession le dimanche des Rameaux pour chanter « l’hosanna », qui est un cri de joie glorifiant Dieu.

Le terme « hosanna » est d’origine hébraïque. Il commémorait, au 1er siècle, l’entrée de Jésus à Jérusalem, le jour des Rameaux, accueilli par la population avec des branches de palmiers en disant «  hosanna », qui est une exclamation de joie et de bienvenue.

Les croix hosannières sont des monuments funéraires, construits dans les cimetières, à partir du X ème siècle dans l’ouest de la France principalement en Vendée et en Poitou- Charente.

Elles sont constituées d’un soubassement circulaire en gradins sur lequel repose une colonne surmontée d’une croix Elles dominaient, à l’origine, généralement une  fosse commune ou un ossuaire.

NB/ A Vayres, l’ancien cimetière ne dispose pas d’ossuaire.

// A voir en Haute -Vienne : Montrol-Sénard – environ 35 km de Vayres.

A ne pas confondre avec la lanterne des morts ( une de forme carrée est située à une vingtaine de km de Vayres au cimetière de Saint -Victurnien) pas de croix et cet édifice maçonné, de forme variable, souvent élancé, en forme de tour, est généralement creux et surmonté d’un pavillon ajouré (au moins trois ouvertures), dans lequel au crépuscule on hissait, souvent avec un système de poulies, une lampe allumée supposée servir de guide aux défunts.

La maîtrise locale de la technique de la peinture su porcelaine permet à la région de Limoges d’avoir un demi siècle d’avance.

Avec les couronnes de fleurs en céramique, le fleurissement se substitue à la plantation.

1867

– Nouveau règlement

On privilégie l’horizontalité des tombes

La pierre l’emporte sur la terre ! C’est l’avènement du cimetière minéral

La ville de Limoges est obligée de légiférer, incluant dans le nouveau règlement un article stipulant que « toute plantation d’arbres […] est interdite dans les concessions perpétuelles ou temporaires. les arbustes ne seront tolérés, qu’à la condition d’être élagués ou même arrachés, si le développement de leur branches ou de leurs racines devenaient nuisible.  »

Ce qui n’est pas sans conséquence sur l’apparence des cimetières, il devienne forêt de dalles et de stèles.

Au XIX siècle, le rapport à la mort est relativement serein, 1860/1880, l’on comprend que la mort est un terme définitif de l’existence.

Le rapport à la mort est teinté à la fois d’archaïsme et de modernité.

La Troisième République, ou III République

Régime républicain en vigueur en France de septembre 1870 à juillet 1940, soit pendant presque 70 ans, le premier à s’imposer en France dans la durée depuis 1789. 

1881

Conformément à la loi du 14 novembre 1881, ces « espaces regroupant les défunts de même confession » ne doivent cependant pas être isolés des autres parties du cimetière par une séparation matérielle. Donc les principes d’ « égalité » face à la mort et de laïcité doivent demeurer tout en garantissant aux croyants la possibilité d’être inhumés selon leurs rites, quelle que soit sa religion et sans contraintes.

Après l’écrasement de la Commune de Paris, la combativité républicaine reprend plus que jamais en faveur d’une laïcisation des institutions.

La naissance de la IIIe République relance le combat en faveur d’une laïcisation des institutions. Le programme de Belleville,  prononcé par Gambetta alors qu’il est candidat aux élections législatives, en avait fait, dès 1869, l’un des axes majeurs du discours radical républicain.

Laïcité scolaire (Jules Ferry), statut personnel, et séparation!

L’aveuglement contre-révolutionnaire de la hiérarchie catholique et la position clairement antirépublicaine d’un certain nombre de congrégations religieuses devaient rendre la séparation inéluctable. L’attitude adoptée par les assomptionnistes au cours de l’« Affaire Dreyfus », aux côtés des forces antisémites et hostiles à la République, plus largement l’attitude de combat que l’Église adoptait à l’égard des mesures de laïcisation de l’enseignement, imposaient que soit mis en place un encadrement juridique des congrégations religieuses, ce que fit la loi du 1er juillet 1901 sur la liberté d’association.

1905

Les polémiques suscitées par l’application du texte jointes à d’autres sujets de discorde, devaient aboutir à la rupture des relations diplomatiques entre le Vatican et la France et au constat, corrélatif, de la caducité du Concordat. La voie était ouverte pour une véritable séparation entre les Églises et l’État, ce que réalisera la loi du 9 décembre 1905.

Il est significatif que même la loi de 1905 Article 28 de la Loi du 9 décembre 1905] pourtant si drastique, ait prévu la possibilité d’expression de la religion dans les cimetières.

L’hécatombe de la Première Guerre Mondiale fait 40 000 victimes en Limousin, 4000 morts pour la seule ville de Limoges, le cimetière ne cesse de s’agrandir, il quitte la dénomination « Champ du repos » pour devenir « la ville des morts ».

La Constitution de 1958 légitime la laïcité et la neutralité des cimetières : il est interdit d’ériger des symboles religieux dans les espaces publics, ce qu’avait déjà précisé l’article 28 de la loi 1905.

S’il est interdit d’ériger des symboles religieux dans les espaces publics depuis la constitution de 1958, la présence de signes religieux sur la sépulture individuelle est néanmoins autorisée.

La création ou l’agrandissement des cimetières confessionnels construits avant 1881 est en revanche strictement interdit.

Cependant, une demande forte des communautés religieuses a entrainé la prise en compte d’un compromis entre respect des rites religieux et le principe invariable de la laïcité des cimetières.

Les circulaires du 28 novembre 1975 et du 14 février 1991 ont ainsi permis aux maires de créer des emplacements spécifiques dans les cimetières.

Puis pour permettre aux maires de gérer « l’existence d’espaces regroupant les défunts de même confession, en prenant soin de respecter le principe de neutralité des parties communes du cimetière ainsi que le principe de liberté de croyance individuelle ».

19 Février 2008

une circulaire du 19 février 2008 a rassemblé tous les éléments essentiels du droit concernant la police des funérailles et des cimetières.

Allant plus loin, l’État, au travers de diverses circulaires, a prévu des exceptions très larges à ses principes fondamentaux, allant même jusqu’à prôner des « carrés confessionnels », avatars des cimetières confessionnels supprimés par les lois sur la laïcité.

La plus emblématique est la circulaire du 19 février 2008 [Circulaire du 19 février 2008 ] qui traite notamment des « difficultés rencontrées à l’occasion du décès d’une personne dont la famille, ou un proche, souhaite qu’elle soit inhumée selon les règles ou les usages définis par sa religion, ceux-ci n’étant pas toujours compatibles avec les dispositions législatives et réglementaires ». Source

« Les obsèques sont faites pour les vivants, pour des vivants qui souffrent. La priorité est de pouvoir les aider.

Dans ces conditions, la conception que l’on peut avoir de la laïcité « classique », « à la française », celle qui est constitutive de notre ciment social en France, doit s’effacer devant une préoccupation d’humanisme.

Il faut savoir alors accueillir les croyants dans leur diversité, leur permettre d’accomplir des rites qui ont du sens et qui vont les aider. Mais il faut aussi savoir accueillir les non-croyants en leur offrant des rites aussi performatifs et apaisants. « Laïcité et rites funéraires de François Michaud Nérard

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