Pour sa dixième édition, nous n’avons, exceptionnellement, pas participé aux Printemps des Cimetières 2025! Nous étions en visite, non loin, puisque nous nous sommes rendues à Saint-Junien.
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Ici, le lien officiel de l’évènement qui se déroule sur plusieurs jours: Printemps des cimetières
Le thème de cette année: Faune, flore et biodiversité dans les cimetières!
Avant toute chose, la biodiversité c’est quoi ? C’est nous. Nous faisons partie de la biodiversité qu’on n’y connaisse quelque chose ou pas. Ce sont des variétés de formes de vie sur Terre, la biodiversité c’est le tissu vivant de la planète!
Dans le cas de cette opération, Le Printemps des Cimetières, il serait bon de préciser qu’il s’agit de biodiversité ordinaire ou biodiversité commune, c’est-à-dire les espèces communes qui nous entourent, tout en gardant à l’esprit que la qualification d’« espèce commune » est toujours relative à un espace géographique donné.
Le thème est étrangement formulé, pour être précise, nous comprenons que vulgariser peut sembler plus pratique sauf que ce n’est pas faune, flore et biodiversité c’est soit la biodiversité floristique et faunistique soit c’est une forme de non sens car de quelle flore parlons -nous ?
De celle qui est plantée, semée par la mairie ou de celle qui est déposée sur les tombes, majoritairement, importées par les usagers ?
Il aurait pu être intéressant d’aborder, dans le détail, celles qu’on appelle adventices et les invasives et de souligner leurs différences.
Et de quelle faune pouvait-on bien parler ? Avec la destruction des habitats naturels en ville, qu’est-ce qui a été mis en place, des abris, gîtes, hôtels à insectes ? Nichoirs ? Par qui ? Des associations, la mairie ? Telles étaient nos questions avant de nous déplacer.
En outre, parler de biodiversité urbaine aurait pu être une bonne idée à Saint-Junien.
Bref, curieuses et dans l’envie de découvrir ce qui se fait chez nos voisins, nous sommes parties en vadrouille locale.
Vous pourrez lire dans cet article nos réflexions et remarques avec leur source qui nous semblent importantes à comprendre pour ne pas généraliser.
De notre côté, nous avons déjà évoqué, à Vayres, ce fastidieux travail de terrain et de recherches que nous réalisons sur le site de l’ancien cimetière. Ce projet en faveur de la biodiversité, divisé en trois temps qui s’étale sur trois ans, avait été proposé à la municipalité précédente en janvier 2024. Il avait reçu un accueil intéressé et favorable de l’ancienne maire. Depuis, avec la nouvelle municipalité, rien.
Voici, dans les très grandes lignes, les idées du Projet-de-valorisation-de l’ancien cimetière de Vayres sans ajouts des évolutions et précisions apportées courant 2023/24.
Il est consultable dans son intégralité uniquement sur RDV.
Voici, un article rédigé par nos soins en 2023 au sujet de la biodiversité dans les cimetières: le cimetière un bon indicateur de la prise en compte de la biodiversité par les communes
Nous apprécions l’opération du Printemps des Cimetières et avons proposé, chaque année, un temps fort différent, depuis 2022. En 2023, nous précisions notre travail avec : un cimetière, un jardin thérapeutique
L’an passé, 2024, nous l’avons associé à la Fête de la diversité culturelle en organisant un concert gratuit au lavoir de Vayres puis une conférence discussion sur le site de l’ancien cimetière. Vous pouvez découvrir cette belle journée : Printemps des Cimetières et diversité culturelle en mai 2024à Vayres
Avec, en supplément, un bel article de presse, consultable depuis la page Revue de presse
Vous pouvez reprendre quelques notes de lecture et références: Des funérailles de porcelaine-notes de lecture
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Cette année étant très particulière pour nous, à Vayres, nous avons préféré ne pas répondre à l’appel à participation de l’opération et nous rendre à Saint-Junien aussi pour découvrir la proposition de RDV du vendredi 16 mai après-midi pour « Flore et biodiversité dans les cimetières » avec la Société des Vielles Pierres.
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Le rdv sera animé par le responsable espace verts de la commune de Saint-Junien et de la CC POL (Porte Océane du Limousin) et l’un des animateurs de la Société des Vielles Pierres.
En image, voici l’allée refaite par la mairie qui permet un accès supplémentaire au cimetière. En effet, en 2009, d’importants travaux de réaménagements et de végétalisation du cimetière ont eu lieu.
Nous avons pu prendre la mesure de la surface que représente la commune, à savoir 120 hectares, pour dix agents seulement, ce qui engendre un travail conséquent en termes de fleurissement et de végétalisation.
Cette balade nous a donné envie de poser de nombreuses questions, que voulez-vous, nous sommes vives et animées par ce que nous passionne…Et de pouvoir visiter, par la suite, les serres communales!
Nous avons découvert un lieu, inconnu jusqu’alors, une Chapelle!
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« Située à l’intérieur du cimetière, la chapelle est ouverte lors des journées du patrimoine et à l’occasion d’expositions ponctuelles, moments privilégiés pour découvrir son mobilier dont un retable restauré en 2011. Dédiée tour à tour à Sainte Madeleine puis au mystérieux Saint Guignefort, elle fut également le siège des Pénitents bleus. »
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Cette Chapelle semble se nommer Chapelle Sainte-Madeleine, « appelée jadis chapelle du Civoire, de Saint-Junien, c’ est un petit édifice formé d’un chœur à chevet semi-circulaire dont l’origine serait antérieure au XIIIème siècle. Cette chapelle autrefois dédiée à Saint-Guignefort fut rebâtie en 1281 et dédiée à Sainte-Madeleine. »
Ci-dessous, un document qui retrace l’historique de cet édifice.
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Nous avons parcouru quelques allées, sous un soleil opportun, avons découvert quelques plaques, des singularités sur lesquelles nous reviendrons, et avons constaté que la partie dite ancienne était la plus spacieuse, lumineuse, au fleurissement constellé de rosiers, cistes, arbres et arbustes qui, par ailleurs, ne nous offraient guère d’ombre.
L’îlot de chaleur, déjà relevé à Vayres, sur le site sur lequel nous réfléchissons est toujours présent dans les allées, où le minéral prend une place importante mais où il est, à Saint-Junien, moins oppressant dans la partie dite ancienne du cimetière.
Nous relisons cet extrait de Foucault sur les Espaces autres dont voici un extrait sur les cimetières qu’il qualifie de curieuse hétérotopie: « c’est simplement au cours du XIXème siècle qu’on a commencé à procéder aux déplacements des cimetières vers les faubourgs. Les cimetières constituent alors non plus le vent sacré et immortel de la cité, mais l’ “autre ville” , où chaque famille possède sa noire demeure. Source
Nous pouvons avancer qu’au regard de la sociologie, les tombes les plus imposantes se trouvent toutes au même endroit. Dans la partie dite moderne, les tombes, sont très serrées les unes contre les autres, ce qui contribue à une grande disparité territoriale entre les disparus, suite logique aux disparités sociales existantes de leurs vivants à l’instar d’un miroir.
Un cimetière fonctionne comme une photographie, comprendre ce qu’il montre peut être reçu de manière sociétale, politique, légale, religieuse, toutefois les questions d’espace et de places sont très présentes et d’actualité, au-delà même du prix d’une concession.
Nous nous sommes renseignées quant à la gestion différenciée des espaces, nous avons demandé s’il était envisageable de laisser des espaces sans tonte sur le site du cimetière. Nous entendons que la flore adventice ne semble pas tolérée ni appréciée par les usagers du cimetière, que la mairie cherche des solutions et plante, par exemple, du thym et du sedum.
Perceptions et influences
Nous avons évoqué la place fondamentale de la sensibilisation auprès des publics/usagers des cimetières et des habitants sur les notions d’esthétiques, de culture du paysage et du jardin, sur le caractère indispensable de questionner: pourquoi les « mauvaises herbes » sont-elles perçues comme négatives ?
Avec la question culturelle et l’histoire de la beauté et de la laideur, nous pouvons nous demander si précisément ces plantes sont rejetées en raison d’une association de valeurs (négligé Versus ordre) ? Est-ce leur couleur, forme, est-ce par habitude transmise de manière générationnelle ?
Nous avons pris connaissance, voilà quelques mois, de l’article de Francesca Di Pietro, Stéphanie Gosset et Roger Coly (2024) sur les jardins familiaux et pensons qu’un lien peut être fait entre jardins familiaux et fleurissement des tombes d’un cimetière.
Cet article révèle que les caractéristiques socio-démographiques des jardiniers influencent la biodiversité de leurs parcelles, notamment la flore spontanée. Il met en évidence la diversité des espèces spontanées dans ces jardins, mais souligne que celles-ci sont souvent mal perçues et éliminées par les jardiniers, considérant leur présence contradictoire avec la fonction alimentaire du jardin.
Des différences basées sur le genre, le niveau d’éducation et la situation professionnelle sont ainsi dévoilées. Enfin, la motivation personnelle des jardiniers influence également la biodiversité de leurs parcelles.
Pour conforter la capacité d’accueil de la biodiversité dans les jardins familiaux, l’attitude des gestionnaires locaux (associations et communes) à l’égard de la plantation de ligneux et de la gestion des allées communes devra évoluer. Si les gestionnaires ont évolué en ce qui concerne l’utilisation des pesticides de synthèse, désormais légalement interdits pour un usage non agricole, leur hostilité envers la flore spontanée se maintient, et accompagne un modèle esthétique de la parcelle agricole entretenue, contrôlée, maîtrisée, qui fonde la gestion de ces espaces voués à une fonction alimentaire.
Si cette fonction persiste, d’autres fonctions, dont celle de loisir et bien-être, s’affirment progressivement : leur coexistence, non seulement dans les jardins mais aussi dans les parcelles elles-mêmes, devrait être encouragée. Source :Des plantes et des jardiniers dans la ville. Socio-écologie des jardins familiaux
Nous savons que ce n’est pas une question de génération, d’une part parce que le combat écologique ne date pas d’hier, au delà des effets de mode et implicitement de rejet aujourd’hui pouvant aller jusqu’à l’ecobashing. NB/ Vous pouvez prendre connaissance de cet article sur l’émission de 2020 d’arrêt sur images. On peut se souvenir de René Dumont, en 1973 et beaucoup d’antres dont Françoise d’Eaubonne, éco féministe dont nous avons célébré les 50 ans de la sortie, l’an passé, de son livre « Ecoféminisme ou la mort ». D’autre part, parce que le jardin au naturel, la prise en compte de la biodiversité, nous apparaissent comme davantage culturelle voire sociologique, bien au-delà de la notion de génération.
L’âge comme variable en plus d’être simpliste est aussi une erreur. A noter que la dimension transgénérationnelle dans la transmission et le partage des savoirs ne doit pas être descendante au sens d’un savoir reçu, transmis dans un sens, du haut vers le bas, le haut représentant la figure du sachant et le bas celle de l’élève. N’oublions pas Jacques Rancière et son livre « Le maître ignorant »; enfin, l’usage du mot » aîné » est discriminatoire.
La communication est primordiale et sans préjugé.
Favoriser la biodiversité, quels leviers
La question des pesticides
« Favoriser l’environnement et la biodiversité: limiter les risques qui pèsent sur cette dernière n’ont pas été des leviers d’action majeurs dans la mise en place de dynamique de limitation de ces produits. C’est ce qui ressort de l’étude réalisée par Sébastien Léonard sur les « scènes locales du risque », en Poitou-Charentes.
Sur 83 communes enquêtées :
- 62 des interviewés sont apparus sensibilisés aux risques liés aux pesticides, dont 19 qui s’avouent « très préoccupés »
- 50 se sont montrés sensibles mais le problème leur paraît lointain, et ne pas relever de leur ressort
- 14 ne perçoivent pas directement de risque, et prennent une posture défensive en faveur de ces produits.
Il montre comment les scènes locales du risque se mettent progressivement en place, à partir d’un affichage du risque par un acteur donné. Les approches « santé sécurité », qui renvoient aux propres pratiques des publics visés, se sont montrées efficaces pour faire évoluer les comportements individuels de certains publics, ce qui n’est pas forcément le cas avec un argumentaire environnemental.
Cette perception du risque par les acteurs est fortement liée aux influences sociales et culturelles, à la manière de concevoir le savoir, la nature et le corps.
« On peut poser l’hypothèse qu’une représentation négative de la nature détermine une perception négative des plantes spontanées. Le second est lié à la signification sociopolitique de la présence des plantes spontanées dans l’espace. Leur absence est connotée à l’idée implicite de propreté, d’ordre (autant végétal que social), de travail, de bonne gestion. La difficulté est d’identifier les leviers de changement de ces normes, afin que les plantes spontanées manifestent autre chose que du désordre, de la saleté, de la désorganisation.
/// « À l’issue de la revue ci-dessous, quelques pistes se dessinent, qu’on cherchera à évaluer dans les résultats de l’étude réalisée.
Il sera notamment intéressant:
- d’identifier les types de regard qu’on peut porter sur les plantes spontanées, ainsi que leur fréquence : regard esthétique, hygiéniste, bio centrique, et la manière dont cela influe sur l’acceptation ou le rejet de ces éléments.
- d’identifier les éléments sur lesquels s’élabore la perception : la fleur, la couleur, la diversité, la taille etc.
- de préciser le rôle des facteurs socio-économiques. «
A lire :
Un réel travail d’enquête doit être réalisé pour mieux saisir les freins, et dans le cas du cimetière, interroger la perception des espaces aussi petits que des trottoirs, là, les inter tombes, de petites parcelles et les images associées aux herbes/plantes. Expliquer que c’est le sol qui détermine ce qui pousse, tondre à ras ne changera rien, pire cela abîmera encore le sol en l’exposant à la chaleur. Maltraiter le sol nous est signalé par les plantes bioindicatrices. Les sols des cimetières sont pollués. Ils sont contaminés en profondeur. L’inhumation et la crémation contaminent également l’atmosphère. Mourir pollue.
Cela nous apparait toujours très particulier d’entendre des personnes ne pas faire le lien entre la biodiversité donc le vivant, nous, la faune, la flore, le sol et les morts, de ne pas pleinement saisir ce qui se joue pour les espèces qui nous entourent et pour nous-mêmes.
De manière pratique, nous pouvons nous essayer à un jeu. Nous aimons ce que nous comprenons, alors, nous vous invitons à un « vis ma vie » mais cette fois-ci vis ma vie d’abeilles, de papillon, d’oiseau…Car où ces espèces vivent en ville ? Comment peuvent -elles se nourrir ? Se reproduire, survivre ?
« Les populations mondiales de mammifères, d’oiseaux, de poissons, de reptiles et d’amphibiens ont diminué en moyenne de 68% en seulement 50 ans, principalement à cause de la dégradation de l’environnement, qui elle-même contribue à l’émergence de maladies zoonotiques telles que la pandémie COVID-19. «
Lors de cette sortie, nous avons pensé à Gilles Clément et son concept de « Tiers paysage » : ce concept s’inscrit dans le « projet politique d’écologie humaniste » : en valorisant ainsi des espaces habituellement considérés comme négligeables, la théorie du paysagiste invite les décideurs et les concepteurs à ne pas intervenir sur certaines portions d’aménagements.
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Durant cette promenade, nous pouvons pu comprendre que les types de pierre accueillent différemment le temps, le calcaire souffre, le granit semble poursuivre sa vie tranquille, le marbre ne sera pas évoqué. Les matériaux comme la céramique, la fragilité des plaques de porcelaine, mais aussi, la fonte, plus rare, le métal…Nous voilà partie en plein sciences des matériaux! Et oui, la conception des stèles et des ornementations disent beaucoup des usages, des modes…Ainsi que la part de créativité, depuis la subtilité des détails, la beauté du dessin, le réalisme du résultat, sans oublier les symboles qui, eux-aussi, évoluent.
Nous avions déjà étudié les évolutions des propriétés physiques, mécaniques et la chimie pour mieux comprendre l’état de dépérissement de certains édifices.
Pour autant quoi dire du lierre ? En fonction du type de pierre à laquelle il s’attaque, les effets ne sont pas les mêmes! Question que nous nous sommes déjà longuement posées à Vayres et à Chéronnac.
Ici, en image, une tombe à double couronne, la seconde est en fonte avec pour ornementation florale, la rose, symbole d’amour éternel.
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A été posée la question des concessions perpétuelles. Nous avons pu lire ici ce qui suit:
» Les communes ont le loisir de déterminer la durée de la concession funéraire. Il est possible d’accorder :
- Des concessions temporaires pour quinze ans au plus
- Des concessions trentenaires
- Des concessions cinquantenaires
- Des concessions perpétuelles (elles ne le proposent plus depuis 1996).
Une concession perpétuelle peut, elle aussi, être récupérée par la mairie si un état d’abandon est constaté sur la parcelle. Malgré sa dénomination, la concession perpétuelle n’a donc pas un caractère immuable, l’entretient de la sépulture constituant une obligation des bénéficiaires.
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En image, voici une stèle en calcaire avec une très belle ornementation taillée dans la pierre, qui de loin, ressemble à deux yeux, tel un hibou. En réalité, il s’agit, au centre, d’un vase type amphore qui accueille une pensée (sentiments profonds, émotions intenses) entourée par des feuilles. Nous reconnaissons le lierre (fidélité de vie éternelle) et des feuilles d’arbre notamment de chêne (symbole de robustesse et de longévité).
De chaque coté de la plaque centrale vitrée, deux flambeaux type colonne avec la présence de flamme en bas. Trois traits au niveau du piédestal, nous pouvons, peut-être, suggérer que le nombre 3 est présent ici car il est fortement associé à diverses religions et croyances et représente souvent les fondements de la foi et le symbole du divin. Le nombre 3 est présent dans presque toutes les cultures.
Voilà, avec toutes les associations, interrogations et précisions, tout ce que nous pouvons dire de cette journée!
A bientôt
