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Nous avons décidé de parler des subventions parce que cela nous touche de multiples manières, en tant qu’association, programmatrice/programmateur, professionnel.le du secteur de la culture, consommatrices/consommateurs culturels et en tant que créatrices et créateurs. Cela peut sembler être un sujet léger, traité avec humour, mais les subventions c’est un sujet qui fâche, qui peut faire mal et avoir des conséquences, parfois, inattendues…
A partir de ces 5 bonnes raisons, nous allons commencé par le début, à savoir sa définition.
Sa définition: « La subvention permet aux collectivités territoriales de reconnaître une activité comme ayant un intérêt local et créer une convergence avec les intérêts d’autres acteurs. Cependant, il existe d’autres procédures que les personnes publiques ne doivent pas négliger dans leur action car en cas d’erreur, le juge n’hésitera pas requalifier une subvention si elle ne remplit pas les critères nécessaires. » […] Il faut, dès à présent, préciser que la subvention est un choix purement politique qui repose sur les élus locaux. Par conséquent, au regard de leur libre administration, les collectivités choisissent librement d’accorder ou non une subvention. Source: subventions locales
L’article 59 de la loi 31 juillet 2014 définit les subventions comme « des contributions facultatives de toute nature, valorisées dans l’acte d’attribution, décidées par les autorités administratives et les organismes chargés de la gestion d’un service public industriel et commercial, justifiées par un intérêt général et destinées à la réalisation d’une action ou d’un projet d’investissement, à la contribution au développement d’activités ou au financement global de l’activité de l’organisme de droit privé bénéficiaire. Ces actions, projets ou activités sont initiés, définis et mis en œuvre par les organismes de droit privé bénéficiaires. / Ces contributions ne peuvent constituer la rémunération de prestations individualisées répondant aux besoins des autorités ou organismes qui les accordent »

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Voici un sujet qui permet d’apporter quelques éclairages, qui peut aussi, le cas échéant, ouvrir les yeux, appréhender les conséquences que peuvent engendrer, notamment, les baisses de subvention. La subvention est éminemment politique et peut en dire long sur les politiques culturelles, par exemple.
Vous pouvez prendre connaissance de ces informations ici:
Comment ça marche ?
Nous commencerons cette immersion avec notre cas associatif à l’échelle d’un village de moins de 1000 habitants, en Haute-Vienne, à Vayres, pour que vous puissiez bien saisir les conditions de vie associative de Vayres à Soi et nous ferons un coup de projecteur sur l’un de ses membres fondateurs.
Les subventions et la place qu’elles occupent dans les ressources associatives: on est peut-être davantage dans du « cas par cas » mais voici ce petit diagramme. Vous noterez que la part des subventions et des commandes publics ne représentent que 20 % .
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Voici ce que vous pouviez lire dans la presse locale dans cet article du 29 avril 2025 du journal l’abeille Le Nouvelliste qui repend les propos prononcé en CM à la Mairie de Vayres de la part du maire actuel au sujet des subventions aux associations: » « La commission des finances a prévu un total de 3 015,91 €, en proposant trois scénarios de répartition de cette somme. Certaines associations ayant cessé leurs activités, nous avons un excédent de 700 € que nous pouvons décider de garder en réserve ou de redistribuer uniformément ou en fonction de leur niveau d’activité dans l’animation communale ».
Vous pouviez comprendre que : nous avions cessé nos activités sur la commune. Non. Nous ne demandons plus de subvention depuis 2025 à la mairie, nous ne sommes pas seules dans ce cas. Nous sommes et restons très actives à Vayres. D’une part, nous souhaitons préserver notre indépendance et d’autre part, nous ambitionnons de quitter cette logique de la subvention et d’inventer une économie nouvelle. Nous avons modifié, en ce sens, l’automne dernier, nos statuts de l’association
Tout dépend du secteur: la culture est celle qui possède la part la plus importante, ici, en vert, avec 37,44%.

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A partir d’un guide fort éclairant pour celles et ceux qui nagent, nous avons illustré l’histoire des subventions.

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On pourrait penser que la subvention c’est la meilleure adresse pour montrer une politique culturelle, le meilleur moyen pour présenter la tête de la culture de la localité où vous résidez. Vous pourriez avoir ce type de questions: quelle gueule a la culture dans mon coin ? Est-elle moderne, tournée vers l’émergence ou elle-t ‘elle coincée, vieillotte, dépassée, loin du compte ? Ou encore trop timide, tiède ? A qui elle s’adresse? Elle met quoi dans « culture » ?
Pour schématiser, qu’est-ce qui est pris en considération ?

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En fonction de ce que vous faites, de vos actions/projets, on vous posent des questions.
Par exemple, pour notre demande de subvention auprès de la mairie de Vayres en 2024, nous avons présenté ces deux projets:
- Une création théâtrale avec représentation (restitution des ateliers de pratique théâtre amateur/d’écriture collective, tous publics, mis en place par l’association en automne 2023)+ un concert (musique folklorique) et un mini carnaval. Le 29/02.
- Un concert (musique Klezmer)+ une visite théâtralisée (médiation culturelle, technique et scientifique) à l’occasion de notre 3ème participation aux Printemps des cimetières afin de fêter la diversité culturelle et valoriser les représentations du patrimoine de la commune (rural, funéraire, floral) le 25 mai.
En réalité ces deux temps forts s’ajoutaient à plus d’une dizaine d’actions en présentiel, hybride et en ligne et à l’organisation complète du Marché de Noël. Une année très riche avec lancement de la brigade verte citoyenne, de la grainothèque et de la ressourcerie verte dès janvier 2024 et poursuite des ateliers singuliers débutés à l’automne précédent. Montant de la subvention attribuée: 100€.
Nous n’avions pas demandé de subvention pour le projet que nous portons pour l’ancien cimetière ni pour celui de la mise en place de la bibliothèque éphémère. Nous reviendrons sur ce dernier point.
Enfin, dans les détails, pour répondre aux questions sur nos activités éducatives et culturelles, nous en sommes là:
« Nous luttons pour la diversification des publics, nous ne nous adressons pas à un public spécifique comme le public scolaire pace que nous militons pour le transgénérationnel donc contre les formes de jeunisse, d’âgisme et toutes les formes de discriminations. Les questions d’accès à la culture, aux loisirs, aux sports, à l’emploi, à la santé… Ne se font pas au détriment d’une catégorie de personnes. Les cloisonnements générationnels sont sources d’exclusion. Nous refusons les généralités générationnelles par respect des personnes. Comme il n’y a pas qu’une jeunesse, il n’y a pas qu’une vieillesse. Et quoi proposer aux mondes du milieu ? Car oui, entre 20 et 70 ans, il y a du monde! De plus, nous portons une voix qui œuvre pour l’égalité, par conséquent, nos actions prennent en compte la reconsidération des rôles, l’ordre établi lié au rôle de genre, à la sexualité et à l’identité. Nous menons également un travail sur la laïcité, question que nous avons longuement abordé lors du Printemps des cimetières (édition 2024). »
Nos actions sont donc « tous publics » même si cette formulation correspond davantage à un adage. En aucun cas, nous n’utiliserons des termes catégoriels et discriminatoires comme « public famille » car ils répondent à une injonction sociétale, celle d’avoir une famille.
Nos activités proposées sont très diversifiées de par nos pluridisciplinarités professionnelles et culturelles. Nous ne nous improvisons pas. Nous animons nous-mêmes des ateliers et des cours et nous programmons. Fruit d’un long travail, en amont, de recherches, résultat de nos compétences et connaissances accrues dans les domaines que nous abordons au fil des années. Nous pouvons organiser des activités artistiques comme la pratique du théâtre en amateur, des cours de photographie, de création graphiques, des cours en histoire de l’art, nous pouvons préparer des sessions d’activités culturelles, scientifiques et techniques parce que nous avons eu plusieurs casquettes dans nos vies voire même plusieurs vies tout court. Des cours de cuisine, au théâtre, aux ateliers singuliers (CV, histoire de l’art …), au jardinage au naturel…Très curieuses, nous nous sommes enrichies en partages et souhaitons, à notre tour partager. Nous avons travaillé à partir d’évènements, d’ateliers pour inciter à la lecture, à l’écriture, à l’alphabétisation, pour comprendre le sens de l’expression « socle commun », saisir la signification de « culture générale » tout en réinterrogeant ces expressions.
Pour ce qui est du loisirs, nous avons proposé des sorties nature (série Histoire de Paysages, sortie Fête de la Nature, JEP…), des ateliers upcycling pour Noël. Sans oublier les collectes de jouets, de plantes pour lutter contre le gaspillage, les chantiers participatifs avec une constante volonté d’inclusivité.
Voici, par exemple, comme nous répondons à quelques thématiques:

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Pour résumé, nous continuons nos adaptations aux demandes, nous poursuivons les rencontres de terrain, les projets en cours. Les idées à réaliser ne manquent pas.
Nous sommes engagées en faveur des droits culturels, là où la concurrence n’existe pas parce que l’enjeu est plus grand qu’un mandat, qu’un ego.
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Pour être plus précises sur deux cas, voici une brève illustration de notre contexte de travail associatif.
En 1, celui du Marché Généreux de Noël (2024)
Nous avons organisé l’intégralité du Marché Généreux de Noël le 21 décembre 2024. Un long travail de trois mois très polyvalent et chronophage qui commença en septembre. A Vayres, un autre marché de Noël en faveur de l’école s’est déroulé la veille au soir, le 20.12, semant le trouble chez les visiteurs et la colère chez les créateurs/exposants. Une communication inexistante entre les porteurs de ces deux projets a produit cela. Nous avions proposé, en amont, aux associations de la commune la gratuité de 3m linéaire (stand maximal) avec l’idée de faire une sorte de forum des associations. Nous avions contacté toutes les associations vayroises, aucune ne s’est manifestée, celle qui nous a contacté demandait 6m, impossible.
Pour cette année, nous avions réservé la salle polyvalente, deux jours les 20 et 21 décembre (2025) dès décembre 2024 pour pouvoir organiser la deuxième édition du Marché Généreux de Noël dans de meilleures conditions avec des horaires plus adaptés. Nous avons été contacté par la commission association émanant du CM de Vayres que nous découvrons en début d’année 2025. Un rdv est proposé en février par mail sans demande des disponibilités. Nous ne pouvons être présentes. Personne ne semble s’enquérir de notre réservation. Puis, un mail plus tard, une date, celle du 14 décembre, sans concertation, invalidant ainsi notre initiative, est imposée.
Quel intérêt d’avoir deux marchés de Noël dans un village aussi petit ? Nous avons annulé notre participation et quittons la lettre de diffusion de cette commission.
En 2, la question de la bibliothèque éphémère
Nous entrons dans la phase double de notre sujet du jour. Notre travail associatif et la profession de l’un des membres fondateurs, celui d’être cheffe de projets culturels avec cursus double en management et en sociologie de la culture.
Nous avons remarqué, dès notre arrivée, la vétusté et la faiblesse de la boite à lire, seule accès à la lecture dans le village. Nous avons posé la question, dès fin 2021, de la place du livre au village et de manière générale des biens culturels accessibles.
Sur Instagram, parce que j’aime les images, vous découvrirez un certain ordre d’apparition des paysages symboliques qui me tiennent à cœur. Cette boîte à lire est la 4 ème image diffusée, depuis la création du compte, en novembre 2021, sur les 385 publiées à ce jour.
Isabelle Pompe, cofondatrice association Vayres à Soi
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Voici donc dans le détail ces 4 paysages symboliques expliqués:
- En 1: (on commence par le bas, ça marche comme ça Insta) les immenses sapins en Haute-Vienne. Il y en a un très présent dans mon jardin (ici en photo celui du Mas du Roule à Vayres) et un clin d’œil appuyée à la série Twin Peaks (fondamentale pour moi): la scierie Packard, Margaret, la femme à la bûche, le plan du générique saison 1 de la très grosse bûche, apparemment centenaire, vous vous souvenez de Josie Packard ?
- En 2, fille de fouteux, le terrain de Foot de Vayres pris en image depuis son angle blanc (espace ultra plébiscité dans mon enfance et rapport passionnel au terrain comme au gymnase)
- En 3, la Rose, fleur de toujours, plus familiale tu meurs (ici, la rose Westerland située en entrée de bourg), toujours présente dans nos sorties et évènements.
- En 4, la fameuse Boite à Lire dont voici le texte d’origine qui accompagne cette image publiée le 18 novembre 2021 « la boite à lire et ses chaussons de Vayres ».
Vous l’aurez, peut-être, compris, j’ai dressé mon autoportrait à partir de ces 4 images qui ont retenu mon attention à Vayres parce que cette association est née d’observations et de constats donc avec ces 4 paysages pour partition première.
Plus en détails, afin de vous expliquer pourquoi un intérêt fort pour la culture et pourquoi pour son accès: je suis Isabelle Pompe, cofondatrice de l’association Vayres à Soi, la culture c’est ma vie. Issue d’une famille lettrée de mélomanes et de cinéphiles, sœur de musicien et d’artiste-comédienne, je crée depuis mon adolescence. C’est aussi mon métier. C’est ma formation en sociologie de la culture de questionner le territoire et l’adéquation entre l’offre et les demandes, les typologies de publics présentes, leur consommation culturelle, et d’observer, d’analyser de façon précise la complexe question des droits culturels dans des espaces de référence spécifique comme la campagne ou la banlieue… Je suis issue d’une filière universitaire d’exception, celle des professionnels de la culture.
En 2023, à Vayres, avec l’association Vayres à Soi, nous sommes en discussion avec l’ancienne maire sur la possibilité d’accueillir une bibliothèque éphémère dans la salle des associations, elle-aussi temporaire. Nous prenons connaissance des livres disponibles entreposés au 1er étage de la mairie, fruits pour la plupart de dons. Nous sommes prêtes techniquement à créer un catalogue, à être présentes sur les heures d’ouverture de la dite salle lors de nos ateliers chaque semaine, à réfléchir sur les techniques d’emprunt et les types d’emprunt possibles.
Il ne faut pas fléchir, pourtant l’histoire semble tomber à l’eau. 2024, nous organisons de multiples temps en lien direct avec la lecture, les formes littéraires, l’écriture, le théâtre, nous créons et organisons un spectacle pluriel dans cette salle des associations, espace non dédié, mais intéressant à investir.
Jamais en reste question idées, nous multiplions les rencontres avec des acteurs et partenaires. La campagne est permissive mais il faut savoir s’investir, se réinventer, être agile sans s’essouffler. Nous sommes en 2025, voilà donc trois ans, nous poursuivons.
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Voici le guide pour 2023/2024
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Ce guide, dans le détail, page 17:
Voilà ce qui nous importe en tant qu’acteur associatif:
« 3.3. POUR UNE RELATION PARTENARIALE ÉQUILIBRÉE : LE RECUEIL D’INITIATIVES
Pour engager ou prolonger une relation contractuelle, les pouvoirs publics peuvent procéder à un recueil d’initiatives associatives.
Il s’agit d’une démarche de co-construction qui consiste, pour la collectivité locale, à faire émerger des projets associatifs susceptibles de s’inscrire dans l’une de ses politiques publiques, parmi lesquelles figure, le cas échéant, sa politique d’appui aux associations. La collectivité locale définit ses orientations et ses objectifs généraux ; les associations proposent des projets dans ce cadre, qui correspondent aux attentes des habitants aussi bien dans des domaines sectoriels que pour l’animation globale du territoire.
Elle peut prendre sa source dans des débats et avis rendus par la conférence territoriale de l’action publique.
Cette démarche de co-construction est fondée sur :
- la complémentarité : une politique publique ne repose pas nécessairement que sur les pouvoirs publics. Elle peut opportunément s’appuyer sur les acteurs de la société civile, en particulier les associations du territoire, porteuses d’une expertise citoyenne et territoriale dans leur champ de compétences.
- un diagnostic partagé du territoire : co-construit avec les acteurs concernés, il sert à définir des axes prioritaires d’actions inscrits dans une politique publique. Ce diagnostic est issu d’espaces d’échanges ou de discussions croisées entre acteurs publics et acteurs de la société civile
- la contractualisation : l’initiative associative est formalisée dans un projet proposé puis discuté avec la collectivité locale. À l’issue de ce dialogue, l’accord est mis en forme par voie conventionnelle ou par décision unilatérale dans les conditions décrites au point 3.1.3
- une évaluation partagée et conjointe, pratiquée au fil de l’eau ou ex post, reposant sur des indicateurs co construits avec l’ensemble des parties prenantes au préalable.
Cette démarche n’a pas pour objet de mettre en concurrence des associations entre elles. Elle vise d’abord à encourager les propositions associatives multiples en valorisant leurs complémentarités d’objectifs et d’actions au bénéfice des habitants et des territoires.
/// »Le principal critère est fondé sur le porteur de l’initiative. La subvention caractérise la situation dans laquelle un organisme de droit privé, poursuivant des objectifs propres, initie, définit et mène une action qui intéresse la collectivité publique. Pour prétendre bénéficier d’une subvention, une association doit être à l’initiative du projet qu’elle va mettre en œuvre, ce dernier devant présenter un intérêt général ou local. Le projet émane des instances de l’association, qui l’a défini avant de le proposer aux pouvoirs publics. L’autorité publique, y trouvant intérêt, apporte soutien et/ou aide. Ce n’est donc pas la collectivité qui définit le besoin ni les réponses à apporter.
Extrait:
« L’autorité publique doit en revanche pouvoir justifier d’un examen individuel en démontrant le caractère proportionné de sa décision avec les faits qui l’ont provoquée (élément objectif) et les conséquences qu’elle emporte (liquidation judiciaire d’une association subventionnée précédemment). Sans exercer de contrôle sur l’opportunité de la décision, le juge administratif peut toujours annuler une décision fondée sur des faits inexacts ou consécutive à une erreur de droit ou une erreur manifeste d’appréciation (il s’agit du contrôle restreint des magistrats de l’ordre administratif). Enfin, le droit européen n’interdit pas les subventions, quel que soit le montant, mais les encadre pour éviter de fausser la concurrence. »
Autre extrait:
« Les associations sont des vecteurs de solidarité, de cohésion sociale et territoriale. Légitimées par les engagements libres et volontaires des citoyens, elles travaillent à abolir les clivages et les inégalités. Dans un contexte de forte évolution des besoins sociaux, les associations jouent un rôle majeur d’alerte et d’interpellation des pouvoirs publics, mais aussi d’expérimentations innovantes et de gestion de proximité de services d’intérêt généraux. Elles sont parfois amenées à prendre le relais des solidarités familiales et viennent en soutien d’actions engagées par la puissance publique. Favoriser et susciter l’initiative associative permet aussi de démultiplier l’action publique et de mobiliser plus largement encore toutes les énergies. Il s’agit en réalité d’un choix stratégique de société en plus d’un choix politique. C’est le sens de la signature de la charte des engagements réciproques du 14 février 2014 entre l’État, le Mouvement Associatif et les collectivités territoriales. Les collectivités sont au cœur de cet accord qui reconnaît la contribution des associations à l’intérêt général. »
La question des subventions, une histoire de compétences ?
Voilà une fenêtre à travers laquelle je suis passée dans la professionnalisation de mon parcours dans le secteur culturel, à l’université de Rouen Normandie. Mon sujet de mémoire universitaire pour mon Master en 2018 avait pour sujet: la programmation culturelle et artistique à l’aune de la Loi NOTRe. Cette loi de 2015 interfère sur les compétences, ici, culturelles. Le principe des droits culturels tel qu’énoncé par cette loi, ça donne ça: « En matière de culture, les compétences sont partagées entre les communes, les départements, les régions et les collectivités. » Je vous laisse imaginer ce que « partage » peut vouloir dire ou donner dans les faits.
Subventions et précarités multiples
Peut-être avez-vous déjà entendu parler de Christelle Morançais ? Nous sommes en région Pays de la Loire. Les coupes budgétaires drastiques sont un drame pour plus d’une structure et plus d’un artiste. Un effondrement s’annonce. Novembre 2024, les coupes budgétaires d’un montant total d’économies de 82 millions d’€ dont 4, 7 millions pour la culture tombent. De quoi s’évanouir et surtout de quoi sérieusement mettre en danger, voire en péril, des formes, des créations, des artistes et des imaginaires.
Les réductions budgétaires engendrent des démissions de directeurs de théâtre public, à lire : » « Dans le théâtre public, des directeurs de plus en plus tentés par le départ anticipé » article du Monde du 27 mars dernier.
La culture entre dans une phase de deuil prolongé.
Nous reprenons les deux portraits parus dans le Télérama du 31/05 au 6/06/2025, dont celui de « l’équipe » du Festival du cinéma espagnol de Nantes piloté par Pilar Martinez, la directrice est bénévole qui n’emploi qu’une seule salariée surqualifiée et payée pas loin du SMIC…Pourtant ce festival #FCEN2026 dont la prochaine édition se déroulera du 21 au 29 mars 2026 c’est : + de 70 films. Cinespagnol
L’orchestre baroque nantais Stradivaria coupe dans ses budgets de maintenance informatique, seule économie possible.
Nous sommes impacté.e.s depuis nos accès à la culture, en passant par l’offre, par le choix qui sera fait de subventionner tel ou tel projet/acteur, cela m’affecte également dans la pratique et l’avenir de mon métier comme de très nombreux professionnels du secteur.
Voici, en ce qui me concerne, pourquoi:
« Depuis que je suis arrivée en Haute-Vienne, novembre 2021, militante des droits culturels, je cherche à rejoindre mon secteur, la culture, de toutes mes forces pour y percevoir un salaire. De toutes mes énergies combattives, je lance, envoie, rencontre, m’exfiltre, m’éloigne, ai pour projet de partir toujours plus loin. 2025, un long et lent premier trimestre s’achève avec une morsure sévère au cœur. Je n’ai plus ma place dans ce secteur. La culture ne peut plus m’embaucher, me payer. Je ne peux plus travailler en tant que bénévole, ne peux plus me précariser davantage, donner de mon temps, offrir mes heures, voir mon parcours sacrifié, voir ma formation, mon grade, réduit, bosser pour des CDD sous payés, des heures professionnelles qui exigent une maitrise globale, des compétences multiples pour pas grand chose. Dans la culture, on est touche à tout, polyvalent à l’extrême, on a tout fait, du secrétariat, de l’accueil artistes, de la programmation, de la gestion, de la communication, de la médiation, de la galère, on est d’un côté et de l’autre, on a crée, imaginé, pensé, on s’est beaucoup adapté et on a beaucoup subi.
Ce que je traverse, nous sommes nombreuses et nombreux à en faire l’expérience au quotidien, au point de nous fragiliser et de ne plus pouvoir perdurer, persister. Ceci vient engendre une succession d’ impacts. »
Nous sommes arrivés à un point financier de non retour, à l’invivable, là, où les dommages pourraient devenir irréversibles. Cela devient trop dangereux de travailler comme ça. Cela engendre une impossible mobilité, un insurmontable handicap, celui de se loger, de pouvoir vivre indépendamment. Vivre sous le seuil combien sommes-nous ? Un risque qui est devenu absolu. Mais personne ne perçoit l’ampleur des dégâts, ni la détresse. Je suis écœurée de devoir changer de métier, c’est comme changer de peau, un truc qui n’est presque pas naturel mais l’obligation est telle que plus rien je ne peux sauver hormis ma peau.
…J’avais rédigé un article voilà deux ans sur le RSA … La culture ne doit pas venir à nous manquer.
Comment s’opposer à la réforme du RSA pour les artistes- autrices entrée en vigueur depuis le 1er janvier 2025 ?
« Nous souhaitons alerter, en particulier, sur les dangers qu’elle fait peser sur l’activité professionnelle des allocataires artistes-auteur·ices. Les artistes-auteur·ices sont artistes plasticien·nes, graphistes, designers, écrivain·es, illustrateur·ices, auteur·ices de bande dessinée, auteur·ices de jeux, compositeur·ices de musiques, scénaristes, réalisateur·ices de films, photographes, auteur·ices de théâtre, chorégraphes, traducteur·ices d’édition et de l’audiovisuel…Contrairement aux professions salariées, la création artistique est décorrélée d’une notion de temps de travail et sa rémunération n’est généralement pas immédiate. Pendant le temps consacré à la création — qui constitue l’essence de leur travail —, les artistes-auteur·ices ne sont pas, ou peu, payés. Or créer nécessite du temps. Et ce n’est qu’une fois l’œuvre achevée qu’ils·elles pourront éventuellement percevoir des revenus d’artiste-auteur·ice, en fonction de la vente ou de la diffusion de celle-ci — données sur lesquelles ils·elles n’ont aucune prise.
En attendant ces hypothétiques retombées financières, les artistes-auteur·ices doivent assumer seuls un temps de travail qui ne génère souvent aucun revenu et occasionne des frais (achat de matériel, déplacements, inscriptions à des évènements professionnels, etc.) Il arrive, par ailleurs, qu’une fois achevées les œuvres ne trouvent pas de débouchés commerciaux immédiats. Dans ce cas, les artistes-auteur·ices n’obtiennent aucun revenu pour le travail effectué. Les chiffres attestent de la sous-rémunération chronique du travail artistique : en 2021, sur la population constante des artistes-auteur·ices (soit 190 000 personnes), 75 % ont perçu moins de 10 000 euros de leur activité dans l’année. La sous-rémunération et l’invisibilisation du travail de création artistique peuvent contraindre les artistes-auteur·ices à recourir au RSA pour survivre.
Ils·elles sont bel et bien actifs et ne souffrent ni d’une perte d’emploi, ni de problèmes de réinsertion, ni d’un manque de formation. En revanche, ils pâtissent de la précarité structurelle liée aux métiers de la création artistique, aggravée par une couverture sociale insuffisante et incomplète. […]
» Source : Artistes-auteurs
Le cas de l’Espace Rebeyrolle à Eymoutiers
Voici un espace que nous soutenons à bout de bras et de tout notre cœur. Allez découvrir ce site artistique en Haute-Vienne et sa nouvelle exposition exceptionnelle! Espace Rebeyrolle C’est le trentième anniversaire de ce lieu atypique, véritable bastion culturel, conçu avec l’architecte Olivier Chaslin.
Les gens viennent ici se prendre du Rebeyrolle plein la gueule
Nathalie Rebeyrolle.
L’expo se nomme: On dit qu’il a la rage. Elle est à voir jusqu’au 30 décembre 2025 à Eymoutiers (route de Nedde) tous les jours de 10h à 18h ou 19h en juin, juillet et août.
Jetez aussi un œil à la boutique, faire une visite-virtuelle
Vous pouvez aussi commander cette splendide affiche :

Un podcast: Le mardi des auteurs /Paul Rebeyrolle, France Culture
Des subventions peuvent-elles tout simplement nous priver d’un accès à une peinture bienfaitrice ?
Nous pouvions lire dans le journal Le Populaire du 27 mai dernier (qui a fait sa une avec ce lieu extraordinaire), quelques mots de Nathalie Rebeyrolle, fille du peintre et directrice du musée au sujet d’une baisse drastique de la subvention régionale:
» Après une première coupe de 26.000 euros en 2023, elle a appris il y a une quinzaine de jours que l’aide serait à nouveau amputée de 15.000 euros, faisant descendre la subvention de la Nouvelle-Aquitaine à 59.000 euros – à laquelle il faut ajouter celles du département (4.500 euros) et de la Drac (8.000 euros), qui n’ont pas baissé.
Paul Rebeyrolle (1926-2005) est un peintre traversé par un élan vital. Né dans le Limousin, en Haute-Vienne, il y vit des années de convalescence en raison d’un grave problème de santé (immobilisé et privé de liberté par une tuberculose osseuse durant 5 années, dans son enfance de ses 5 à ses 10 ans). Il ne cesse de dessiner et de peindre durant cette période forte d’apprentissage. Le visionnaire s’installe à Paris, à 18 ans. Il défend un retour à la réalité en devenant un acteur engagé du Manifeste de l’homme témoin, courant anti abstrait, organisé par Jean Bouret qui milite pour un retour à la réalité dans la peinture. Il existe des séries sur le monétarisme, sur les migrants comme la série Le sac de Mme Tellikdjian qui aborde la condition des migrants et des apatrides. La nature possède une place importante, comme indomptable. En termes d’expérience de visite, stop à la frilosité, Il signe une œuvre engagée et militante qui vous prend à la gorge et vous saisit!
De 1988 à 2003, François Pinault, collecteur précurseur fait l’acquisition de 14 œuvres de l’artiste pour la Collection Pinault.
Un budget aujourd’hui réduit de 36 % fait que la situation n’est plus viable. Avec un chiffre d’affaires annuel bien inférieur à 60.000 euros, comment imaginer pouvoir maintenir nos activités dans ces conditions ? », questionne-t-elle, alors que la fréquentation moyenne est de huit mille entrées par an.
…
On garde espoir, on vous vous souhaite de visiter, sortir, découvrir, de défendre les droits cultures et la diversité!
Isabelle Pompe, en un 1er jour particulier de juin 2025.
